Comme la plupart des associations de plieurs dans le monde, le MFPP constate les difficultés créées par l’absence de jurisprudence spécifique sur la question des droits d’auteurs en origami.

Cette situation résulte de :

  1. la faible représentation de l’origami sur le marché de l’Art et dans le monde professionnel ;
  2. la nature particulière de cet art qu’est l’origami : un art qui ne s’adresse pas à des spectateurs consommateurs, mais invite à une pratique par le biais de diagrammes (en général plus accessibles et didactiques que des partitions de musique). D’où un esprit de partage, d’amitié et de gratuité qui prépare mal à affronter les indélicatesses, voire le pillage de ceux qui gagnent de l’argent avec les inventions d’autrui.

À défaut de proposer de réelles solutions aux problèmes des droits d’auteurs dans l’origami, lesquelles ne peuvent émaner que des juridictions compétentes, le MFPP est au moins en mesure de rappeler toutes les informations dont il dispose sur le sujet, et de préciser sa propre position en tant qu’association loi 1901.

Le MFPP est une association loi 1901 qui « a pour but de développer la création, l’expression et la communication par la pratique du pliage de papier ». En d’autres termes, le MFPP peut soutenir et accompagner des projets dans un but purement culturel, en favorisant le lien social. Son but ne peut et ne doit pas être commercial. A cette condition, il peut néanmoins conserver des liens et des partenariats avec les professionnels.

Ces présupposés étant connus, ajoutons que le MFPP respecte la loi et particulièrement les dispositions du Code de la Propriété Intellectuelle relatives aux droits d’auteurs.

Il considère que les modèles d’origami peuvent et doivent comme toute œuvre de l’esprit bénéficier de la protection accordée aux auteurs par ces textes.

Il recommande aux créateurs de s’assurer du caractère original de leurs créations en utilisant pour cela toutes les sources d’informations disponibles parmi lesquelles Internet (ou l’orithèque pour les membres du MFPP).

Le MFPP ne peut en revanche jouer le rôle de la SACEM, de la SAIF ou toute autre société de gestion des droits d’auteurs, ces actions ne figurant pas dans son objet auquel il doit se conformer.

Il ne peut donc vérifier pour un auteur, fut-il membre, l’antériorité et l’originalité de ses droits ou se substituer à lui dans une éventuelle action en justice pour les faire respecter.

Il rappelle par contre que l’exercice par un auteur de son droit de diffusion n’emporte pas autorisation d’utiliser son modèle en dehors du cercle familial et privé. Le MFPP conseille néanmoins de faire figurer un avertissement sur les utilisations interdites et autorisées par l’auteur dans les diagrammes, Crease Pattern et autres éventuels modes de diffusion.

L’exercice par un auteur de ce droit de diffusion lui apporte une preuve d’antériorité et d’originalité par rapport à des créations postérieures (mais non antérieures) ainsi la publication d’un modèle dans Le Pli (ou dans le fascicule des Rencontres de Mai) peut, en plus d’apporter à notre journal (ou à nos rencontres annuelles) un contenu toujours bienvenu, fournir à l’auteur une preuve de la date de première diffusion.

Sur le plan international, nous rappelons les conclusions du « Rapport Final de la Conférence Internationale sur les Droits de Propriété Intellectuelle en Origami » (du 10 au 13 octobre 2008 au JOAS Hall (Tokyo) :

« Nous proposons et convenons que les droits des artistes en Origami doivent être protégés :

  1. Avant l’utilisation d’un modèle ou d’une conception (diagramme, etc.) 
    • La permission doit être obtenue
    • La rémunération, les modalités et les conditions d’utilisation doivent être acceptées.
  2. Lors de l’utilisation d’un modèle ou d’une conception : 
    • Le crédit doit être accordé au créateur sauf s’il a été explicitement abandonné.

Nous agirons contre les violations de droit d’auteurs et les reproductions et les distributions non autorisées » (traduit de l’anglais par Jean-Claude Vanzut, d’après le texte du Tanteidan magazine n°112).

Demande de dérogation permanente pour les activités non commerciales

Les nombreux amateurs d’origami qu’ils aient ou non créé de modèle, et qui ne pratiquent pas forcément cet art au plus haut niveau peuvent pourtant participer à la diffusion culturelle dont les créateurs les plus prestigieux recevront plus tard les bénéfices. A ce titre, les bénévoles sollicitent une autorisation spéciale pour continuer ce qui de fait a déjà lieu dans la pratique :

  1. réaliser des expositions dans les maisons de quartier, les bibliothèques ou autres lieux publics, au cours de festivals et diverses réunions publiques, sans toutefois procéder à un étiquetage systématique ;
  2. enseigner des modèles sans demander chaque fois la permission aux créateurs (mais sans oublier de les citer fréquemment). Ceci à condition de ne tirer aucun bénéfice dépassant le défraiement pour participation active à un événement.

Liberté et éthique sur Internet

La précédente demande de dérogation concerne seulement les activités locales d’amateurs utilisant des moyens de diffusion limités. S’il est question d’Internet, le plus puissant moyen de diffusion contemporain, la même logique de tolérance s’avère inutile et hors de propos. Le nombre de vidéos mises en ligne sans permission des auteurs, omettant la mention des sources, de diagrammes reproduits sans autorisation, dépasse toute mesure, défie tout contrôle. Évidemment, c’est grâce à Internet que l’origami peut être accessible comme il ne l’a jamais été, eu égard à la rareté et au prix des livres. Cependant, d’importants problèmes de qualité se posent, outre l’absence de reconnaissance des créateurs et de partage véritable.

En fin de compte, quand il ne s’agit pas de malhonnêteté pure et simple, les manquements au respect de la propriété intellectuelle ont certainement leur source dans l’image même de l’origami encore considéré par le plus grand nombre comme une activité réservée aux enfants, ou un passe-temps sans valeur artistique. Internet n’en est pas moins un facteur aggravant : le flot d’informations affaiblit la vigilance, la facilité de mise en ligne favorise l’irresponsabilité, la relation virtuelle (souvent sous le masque de pseudos) a lieu sans rencontre effective.

Les actions commerciales, la primauté des Beaux-Arts

De cette image de l’origami découlent certaines pratiques commerciales dénuées de scrupules telles que la vente de modèles d’origami identifiables et sans mention ou accord de l’auteur, sous diverses formes (pliages, mais aussi bijoux, etc.).

Mais de façon plus surprenante, on trouve des artistes contemporains qui méprisent la valeur artistique spécifique à l’origami, tout en récupérant, comme issues de la tradition orale anonyme, des crease patterns bien identifiés pourtant, et s’en servent de matériaux bruts pour élaborer leur propre œuvre, telle la plasticienne américaine à l’encontre de laquelle un groupe de plieurs rassemblés autour de Robert Lang a intenté un procès.

Le rôle des associations non commerciales

D’une part, le milieu associatif réunissant des amateurs, semble confirmer pour un public non averti l’aspect dérisoire de l’origami : à la portée de n’importe qui, peu rentable, etc. Mais d’autre part, les rencontres de plieurs peuvent apporter une réponse, voire une solution à l’indifférence face aux créateurs d’origami, au mépris de la valeur artistique de l’origami. Et le développement d’actions gratuites et désintéressées restaurer le libre jugement esthétique en même temps qu’un certain fairplay.

Liens Internet pour poursuivre cette réflexion

  1. Le site d’Origami Authors and Creators group
  2. La Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques
  3. Un exemple commercial abordé dans le Forum francophone.
  4. Circonstances du procès de Robert Lang